Zadra, c'est d'abord une espèce de pot-pourri de tout ce que Schilke a fait de mieux : la première descente monstrueuse d'airtime, le titanesque Zero-G stall, l’énorme « outward banked top hat » qui p...
Zadra, c'est d'abord une espèce de pot-pourri de tout ce que Schilke a fait de mieux : la première descente monstrueuse d'airtime, le titanesque Zero-G stall, l’énorme « outward banked top hat » qui propose un ejector superbement chorégraphique tant il virevolte brutalement dans un sens puis dans l’autre, le Step-up under flip (on y reviendra), l’EGF-turn au ras du sol pris à une vitesse dépassant l’entendement, les quelques « pop » d’airtime ejector combinés à des G latéraux… Pas un centimètre de rail n’est gâché, et les quelques moments moins éclatants ne sont pas des temps morts pour autant.
C’est que Zadra est un monstre de rythme et de vitesse, qui – à l’instar d’Ispeed dans sa première partie – ne laisse qu’à peine le temps d’appréhender le parcours qui se donne à nous. Certes brutal et sans répit, Zadra est aussi étonnamment aérien, et utilise finalement assez peu la structure en bois inhérente au genre dont il se revendique. Ce qui peut paraître vu du sol plutôt cocasse (pourquoi vanter Zadra comme un « wooden » quand on n’utilise pas un des éléments identitaires de cette catégorie, à savoir le passage dans les structures ?) est en vérité une subtilité stylistique digne d'intérêt : par contraste, les rares moments où le trains s’engouffre franchement au milieu du bois et de l’acier (on parle d’un hybride, soit-dit en passant… pas d'un wooden) sont mis en valeur. Ces moments, ils sont au nombre de deux, le premier étant cet énorme demi-tour bien chargé en G positifs, qui fait un peu penser aux Jr Immelmans de Taron ou Black Mamba en version primitive, mais qui contrairement à ces deux là se termine par un grand moment d’airtime (contraste encore !).
Le deuxième – incontestablement le plus mémorable – survient lors d’un incroyable Step-up under flip qui s’engouffre justement dans la même structure colossale. Si de jour ce brusque retournement a déjà la formidable vivacité de combiner avec une rare finesse la grâce aérienne et la proximité avec le tangible, c’est de nuit qu’il se révèle comme un élément clé de Zadra. La pénombre qui fait complètement disparaître la ligne d'horizon, les lumières projetées d'un peu partout qui traversent difficilement l'opaque structure, le fait que ce retournement ne nous ramène pas tout à fait à l'endroit (puisqu'il se termine en virage) et surtout la vitesse du grand-huit chaud bouillant (combinée à une impeccable sensation d'apesanteur) produisent quelque chose de complètement inédit (du moins pour un coaster enthusiast avisé) : pendant un court instant, tous nos sens sont brouillés et on ne sait tout bonnement plus si on est à l'endroit ou à l'envers. C'est simple dit comme ça, mais lorsque les concepts de gravité, de verticalité et d'horizontalité échappent à littéralement TOUTE PERCEPTION (y compris visuelle), il ne reste plus que l'impression d'être dans une autre dimension… C’est proprement ahurissant.
C’est cette inversion qui fait passer Zadra dans une catégorie supérieure, celle très restreinte des grands-huit euphorisants qui transcendent tous leurs contrastes pour offrir une expérience échappant réellement aux règles de l’entendement. Un chef d’œuvre.